Le commerce des produits estampillés « halal »
prospère dans de nombreux pays d’Europe
ou résident des communautés musulmanes. Mais pas
seulement musulmanes. En France et en Belgique,
ce business florissant a suscité une agitation
idéologique qui semble s’être tassée. L’expansion
du produit « halal » se poursuit caractérisée par
des réussites commerciales, et, donc financières.
urant le mois de ramadhan
dernier, les produits
« halal » ont envahi les rayons
des grands et petits magasins
de plusieurs villes d’Europe.
En France, un reportage du
quotidien Le Monde constatait
que la marque Isla Délice,
« spécialisée dans la charcuterie
et les plats cuisinés
halal », avait lancé une campagne
de publicité sur 6 000
panneaux d’affichage dans
toute la France. Et le quotidien
français de relever que
« son concurrent Zakia Halal,
filiale de Panzani » l’avait précédé
– bien que timidement –
en diffusant un spot publicitaire
sur une chaîne de télévision
française. Le journal a
essayé de comprendre un peu
ce phénomène en s’adressant
à un publicitaire. Jean-Christophe
Després, fondateur de
l’agence de marketing communautaire
Sopi, a eu une
explication relativement simpliste
: « Depuis quelques années,
on assiste à une demande
de consommation identitaire
de plus en plus forte. Le
contexte politique et sociétal,
les débats sur l’islam et les
musulmans alimentent un
sentiment communautaire
qui se renforce ».
On sait qu’une tendance « ultra-
laïque » a sorti ses griffes
lorsque la chaîne « Quick » a
annoncé qu’elle étend son offre
de restaurants halal. C’est
du communautarisme, c’est
inacceptable etc…Il se trouve
que ces réactions quasi
hystériques ont été toujours
absentes lorsqu’il s’est agit de
restaurants casher ou d’épicerie,
de rayons casher dans
les grandes surfaces. Deux
poids, deux mesures.
UN MARCHÉ DE PLUS
DE 4 MILLIARDS
D’EUROS
Le réalisme des entrepreneurs
semble avoir
pris le dessus sur ces
considérations à connotation
xénophobe. En France, en
2010, ce marché du « halal »
représenterait environ 4,5
milliards d’euros alors qu’on
l’estimait en 2005 à 523 millions
d’euros, seulement. Il
aurait été multiplié presque
par dix en cinq ans ! Il faut
dire que pendant des décennies,
ce marché était essentiellement
confiné à quelques
réseaux de boucherie. C’est
en substance d’Arabie Saoudite
que le « halal » alimentaire
est venu. En Arabie saoudite,
depuis environ quarante
ans de nombreux produits importés
d’Occident sont estampillés
« halal » (bière sans alcool,
saucisson de boeuf etc…). Ils
ont été spécialement fabriqués
dans le respect des prescriptions
religieuses.
En France, la question se
pose de savoir qui donne la
certification « halal ». Pour la
viande, pendant longtemps ce
fut la Mosquée de Paris qui
prélevait au passage quelques
centimes pour chaque kg.
Aujourd’hui, en principe, en
France, c’est le ministère de
l’Agriculture qui délivre aux
institutions religieuses le
droit de décerner des « certificats
de sacrificateurs ». Ainsi,
seules la Grande Mosquée de
Paris, la mosquée d’Évry et
celle de Lyon sont habilitées
à délivrer de tels certificats.
En versant 150 euros par an
à ces mosquées délivrant les
certificats, les sacrificateurs
agréés peuvent opérer dans
les abattoirs qui peuvent ainsi
étiqueter leur viande « halal ».
Kamel Kabtane, recteur de la
grande mosquée de Lyon, en
charge du dossier halal au
Conseil français du culte musulman
(CFCM), déclarait en
août dernier au journal Le
Parisien : “A Lyon, nous délivrons
des cartes de sacrificateurs.
Nous avons passé un
contrat avec une quinzaine
d’entreprises situées en France
et même au Royaume-Uni
qui acceptent d’être contrôlées
par nos 30 contrôleurs.
Notre cahier des charges est
très contraignant : la certification
se fait toujours en présence
d’un sacrificateur et
d’un contrôleur. L’abattage
étant manuel, on ne peut pas
faire plus de 2 000 poulets à
l’heure. Par kilo de viande, la
certification halal coûte entre
10 à 15 centimes d’euro.”
« BOUFFE HALAL »
ET « BOUFFE HARAM »
Si pour la viande, la situation
paraît claire, il
n’en est pas de même
pour tous les produits alimentaires,
conserves et
autres, commercialisés. « Isla
Délice », par exemple, est certifié
par « A Votre Service »
(AVS), une société qui agrée
plusieurs dizaines de marques
et qui signale même les
établissements avec qui elle
n’est plus en relation, et qui
donc pourraient ne pas être « halal
». « AVS » est soutenu, sur son
site Internet, par Tarik Ramadan.
Mais ce dernier n’exprime
son soutien que pour les efforts
consentis pour l’application du
« halal » à la viande, seulement.
Pour les autres produits la société
annonce qu’elle publiera
« prochainement une liste sur les
ingrédients présents dans les
produits alimentaires de grande
consommation ». Sur ce
plan, on ne sait pas si ces
produits sont exempts de
porc et d’alcool et par conséquent
authentiquement « halal
», au sens religieux strict.
Quid du conservateur provenant
de la peau de porc,
transformé en gélatine pour
préserver des aliments ? Cette
gélatine est utilisée pour
préserver certains yaourts ou
des friandises. Certains fabricants
la mentionnent sur
leurs étiquetages, d’autres
non. Pour les uns la transformation
de cette peau de
porc lui ôterait son essence
« haram », pour d’autres absolument
pas et il faut s’abstenir
de consommer de produits
contenant cette gélatine. Le
sujet fait encore débat sur les
forums mais beaucoup de fabricants
de renom s’abstiennent
d’en faire mention. Parts
de marché obligent.
DRISS OULIS
Tags:
France
Consommation
Halal
Source : Le Quotidien d'Oran