Le gaz de schiste, son
exploitation et les résistances
qu’il suscite font l’actualité
internationale et… algérienne.
En France, l’offensive des
lobbies pétroliers a échoué,
la fracturation hydraulique
reste interdite. En Algérie,
le débat est en général moins
écologique qu’économique.
Avec des pour et des contre.
En France, l’offensive des lobbies pétroliers
s’est heurtée en définitive à un niet du
président français, François Hollande, qui a
demandé à sa ministre de l’écologie, Delphine
Batho, « de prononcer sans attendre le rejet des
sept demandes de permis d’exploitation auprès
de l’Etat et qui ont légitimement suscité l’inquiétude
dans plusieurs régions de France ».
Le président français a tranché : en l’état actuel
des connaissances personne ne peut affirmer
que l’exploitation des « gaz et huiles de
schiste par fracturation hydraulique, seule
technique aujourd’hui connue, est exempte de
risques lourds pour la santé et l’environnement
». En Algérie, le premier puits d’exploration
de gaz de schiste a été foré, il y a quelques
mois, dans le bassin de l’Ahnet, au sud
d’In Salah. Il s’agit, selon Sonatrach, « d’approfondir
davantage » les données sur les réserves
gazières non conventionnelles et d’établir les techniques de forage adéquates ». Même si la
« résistance écologique » n’a jamais été forte en
Algérie, l’exploration dans le non-conventionnel
fait débat. Ahcène Moussi, expert, établi
au Canada, dans une contribution parue,
dans « lanation.info », souligne que les difficultés
techniques et la durée, plus longue,
du forage horizontal ou de la fracturation
expliquent le « coût élevé » du procédé utilisé
dans l’extraction du schiste. « Un puits de
gaz de schiste horizontal coûte entre 8 à 12
millions de dollars. Alors qu’on ne récupère
que 15 à 20 % de ce gaz, comparativement
à 90 % du gaz récupéré des gisements de
gaz classique. L’écart est significatif. » explique-
t-il. L’écart est « significatif ».
NE PAS SE PRESSER
Tout en estimant nécessaire d’enseigner dans
les universités les techniques d’extraction du
gaz non conventionnel, Ahcène Moussi, estime
que l’Algérie ne gagne rien à s’empresser
à aller vers l’exploitation. « L’Algérie dispose
de réserves, en pétrole et gaz conventionnel,
prouvées, qu’elle pourra exploiter, sans aucune
contrainte, jusqu’en 2030. Ces réserves
récupérables lui permettront de subvenir largement
à tous ses besoins, au cours des vingt
prochaines années, tenant compte de l’évolution
de sa population et de sa demande
moderne ». Pour l’économiste, Abdelhak Lamiri,
économiste, la question du gaz de schiste
se résume à « un choix douloureux ». Il est « très
économique » mais polluant ». Il souligne que
les Etats Unis ont choisi de risquer et de le
mettre en valeur, ce qui pose un énorme dilemme
aux pays producteurs. A mon avis,
ajoute-il, « nous devons avoir un bouquet
énergétique très diversifié et parier à long terme
sur les énergies renouvelables. Nous avons
des entreprises privées qui ont proposé des
variantes intéressantes ». Pour le moment,
recommande-t-il, le gaz de schiste « ne doit être
entrepris qu’à titre expérimental afin d’en
maitriser la technologie. Sais-ton jamais, si
on pouvait le rendre moins polluant dans le
futur ». Nordine Ait-Laoussine, ancien ministre
de l’Energie, rejoint, cet avis. Il explique
que l’exploration des « roches mères » de schiste
en Algérie est une « nécessité pour faire face
au déclin » des réserves de gaz conventionnel.
Par ailleurs, l’ancien ministre de l’Energie,
estime, pour ce qui se rapporte aux contraintes
relatives à la protection de l’environnement
que ces questions sont « exagérées ».
RISQUE DE PERTE DE VALEUR
DES GISEMENTS CONVENTIONNELS
Selon lui, ces contraintes ne s’appliquent pas
avec la même acuité chez nous étant donné
l’isolement et l’éloignement des zones à prospecter,
ajoute-il. Mustapha Benkhemou, expert
en énergie et ex-directeur des études prospectives
et stratégiques au ministère de l’Energie
et des Mines, ne partage pas ce point de vue.
Selon lui, « la réussite de cette filière aura pour
résultat de diviser par deux la valeur de nos
gisements conventionnels (Hassi R’Mel, In Salah,
In Amenas, etc) ». Il évoque par ailleurs les
énormes quantités d’eau nécessaires à la fracturation
d’un seul puits et les risques de pollution
donc de perte- de la nappe albienne,
véritable richesse fossile de l’Algérie sur le très
long terme, et dont les partisans de l’exploration
dans les gaz de schiste ne parlent pas.
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Source : Le Quotidien d'Oran